• Sillah et L'Aimé - Chant I .

    Voici une histoire entre deux êtres étranges dont l'amour triomphe, au-delà de leur différence.
    Ce dialogue est né, porté par la musique que j'écoutais alors, la splendide bande originale du film Old Boy, de Park Chan-Wook, qui à mes yeux est un véritable chef-d'œuvre.
    Si le cœur vous en dit, je vous conseille d'accompagner votre lecture de ce texte par l'écoute de ces trois morceaux à la suite les uns des autres (pistes 20 à 22) : Kiss me Deadly ; Point Blank ; Farewell,my Lovely, afin de vous plonger dans l'atmosphère qui m'inspira alors cette courte histoire.

    Ne les ayant pas encore trouvé en lien, voici  The Last Waltz , tiré de la même Bande Originale, qui pourra accompagner votre lecture, à défaut des autres morceaux.

     

    (Ici, le Chant II .)

     

    Sillah et l'Aimé - Chant I

     

    - Sillah? Où es-tu?

    -Je suis là. Près de toi.

    Je te sens.

    -Où es-tu? Je n'y vois pas...

    Je suis seul?

    -La lumière, là-bas, au Nord...

    -Tu es là?

    -Je suis là...

    Sors de l'obscurité... Tâtonnes, puises-en toi...

    -J'ai si peur... Je n'y vois pas!

    Il n'y a plus de lumière, en moi...

    - ...

    - Sillah? où es-tu?

    -Près de toi mon aimé...

    -Sillah? Tu es là...

    - Je suis là.... Je tiens ta main...

    -J'ai si froid, si froid...

    Je ne te sens pas...

    ...

    Il pleut?

    -Non. Non, mon amour.

    Il ne pleut pas...

    -Je sens...encore un peu...

    Quelques gouttes sur ma main...

    ...

    Sillah... Tu pleures?

    -Quelques larmes, seulement quelques larmes...

    Ne t'en fais pas.

    ...

    -Je m'éteins... Sillah, éclaire-moi...

    Encore un peu...

    -Mes lueurs t'entourent, mon aimé...

    Ouvre les yeux...

    -Mes yeux sont ouverts... Mais...

    Je n'y vois plus... Je ne te sens presque plus...

    Seulement l'obscurité, et le froid, oh! un tel froid...

    ...

    La Mort m'étreint Sillah... Pardonne-moi...

    -... Il n'y a rien à pardonner...

    -Adieu... Sillah... Je t'ai... tant aimée...

    -...

    Ne pleure pas...

    Quand tes yeux s'ouvriront de nouveau... Ne pleure pas...

    Là... Endors-toi... mon amour...

    ...

    -...

    -...

     

     

    A la lune montante...

    Loin, au nord, L'Aimé ouvrit les yeux.

    Blottie contre lui, une très jeune elfe semblait dormir...

    Un sourire se dessinait sur ses lèvres pâles, mais la lueur qui émanait d'elle ne vascillait qu'à peine, à présent...

    Alors, il comprit.

    Il comprit que dans ses cauchemars, en proie à la folie, il avait mortellement blessé cet être de lumière...

    Elle qui, jusqu'au bout, alors qu'il se croyait, lui, mourrant, l'avait veillé...

    Sillah, de toute son âme, avait brillé pour lui, calmant son angoisse...

    Ses larmes laissaient sur sa peau la trace rougeoyante du don de sa vie.

    Il voulut hurler, crier sa rage, sa douleur et sa honte au monde entier...

    Seulement, alors, il se rappela sa demande... "Ne pleure pas... Quand tes yeux s'ouvriront de nouveau... Ne pleure pas..."

    Taisant son chagrin à son corps, il berça doucement sa belle contre lui...

    Elle frissonna, presque imperceptiblement.

    Chuchotant à son oreille :

     

    -Sillah... ma douce... Oh!

    Pardonne-moi...

    Je ne peux te guérir...

    Si seulement...

     

    D'une voix aussi douce qu'un murmure du vent :

     

    -Mon amour... Ne pleure pas...

    Vivre... Ou Mourrir, pour toi...

    Rien n'était plus beau...

    C'est tout ce que je désirais...

    ...

     

    La dernière lueur vacilla, comme le souffle d'un enfant, sur une flamme mourante...

    Une étoile, haut dans les cieux, d'un coup, se détacha; un instant, virevolta, comme une dernière danse, son au-revoir à la nuit éternelle...

    La chute enfin...Et le silence...

    Au loin l'Aimé, déjà, s'en va retrouver à jamais son obscurité...

    Dans son coeur de démon, une entaille : l'amour de la lumière sacrée.

     

    ***

     

     

    Lully. ©



  • Commentaires

    1
    Numéro de série 23 Profil de Numéro de série 23
    Lundi 2 Février 2009 à 17:35
    Ultime et magnifique Rédemption.

    Bon sang que mon esprit est lourd ! Il m'a fallu relire, relire, relire pour m'imprégner de toute la puissance de ce dialogue.
    Non, ce n'est aucunement ton style qui est en cause, mais tout ce fatras et ces bruits autour de moi qui m'absorbent toujours trop.
    Cela fait des années que je ne parviens plus que difficilement à me laisser absorber par un livre ou un récit (sauf cas miraculeux de silence autour de moi!).

    Aussi merci pour l'idée de la musique. Elle est comme un bouclier entre les soucis, l'extérieur, et allège mes efforts de concentration.
    Ainsi je repasse en boucle cette valse, et elle correspond déjà pleinement au texte. Que serait-ce si j'avais écouté les morceaux que tu as recommandés ?

    Il y a une force de suggestion extraordinaire dans ton texte. J'aime l'idée de cet impossible rapprochement, de cette graine lumineuse semée comme une futur promesse, là où elle n'aurait jamais dû prendre.
    Les silences, entre crochets sont autant de paroles.

    As-tu été inspirée par le Cantique des Cantiques de l'Ancien Testament pour la forme ? Superbe et magnifique Hérésie que ton texte, il pourrait prendre place à ses côtés. Je suis converti.

    Mon langage est désagréablement religieux ? Mais ton dialogue a des connotations tellement mystiques, comment pourrait-il en être autrement ^^!
    2
    Lundi 2 Février 2009 à 20:35
    Ton langage, désagréablement religieux?! J'aurai plutôt tendance à le qualifier de dangereusement élogieux, hihi, me voilà toute rose de plaisir et réchauffée par une intense vague d'émotion!
    C'est trop, c'est trop vraiment, je ne vais bientôt plus savoir où me dissimuler!
    Et puis, je ne sais pourquoi, mais ce dialogue, cette courte histoire, a toujours été pour moi d'une grande importance, l'un des ces rares écrits que l'on chérit précieusement, comme un enfant que l'on aurait porté et mis au monde...
    Alors, savoir qu'il peut procurer tant d'émotions, de réflexions, c'est un peu comme une formidable récompense!

    Non, pas du tout, mon inspiration est née uniquement de la musique que j'écoutais alors, et, probablement du fait que j'avais l'envie d'écrire un espèce de chant, depuis quelques temps. A vrai dire je ne crois pas avoir déjà lu ce Cantique des Cantiques, mais je vais aller de ce pas le découvrir, car ta comparaison m'intrigue et m'enchante tout à la fois!

    Bref, chacune de tes interventions est un réel plaisir à lire, j'espère qu'elles continueront longtemps à pleuvoir, et réchauffer ainsi ma confiance en un quelquonque talent. C'est tellement bon de savoir que quelqu'un partage un ressenti, une émotion, qu'il y a ces choses étranges, indiscibles que quelqu'un d'autre perçoit!
    Quand aux connotations mystiques, je crois bien qu'à chaque pas, deci-delà, tu en découvriras, saupoudrées en mon petit chez moi! :)
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