• Fumées grisées âcres

    Vertes apothicaires

    Marchandes d'Insomnie,

    J'en crève

    Crève, Gueule béante sur l'univers

    Barrières géantes s'en venant

    Fracasser le rêve

    Au calvaire d'une vie,

    D'un monde où peur n'est guère

    Vide carcasse s'amenuise et creuse son trou

    Vacarme sourd où pleuvent les coups

    Sur mon fantôme, naguère chair

    Vibrante, vivante,

    Et toujours tienne.

    Qu'il vienne encore le cataclysme

    Arracher chaque plume

    Et puis l'échine

    Briser ma voix en long mutisme

    Où Mort s'écoule

    Langoureusement, susurre enfin

    Dévore Néant!

    L'éternel cri, la chute,

    Au son du vide sentencieux

    Où se terre

    S'abîme la clarté nue

    D'un soleil bleu...

     

     

     

     

    - Lutine Aurel Bonnemaison -


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  • D’aussi loin que je m’en souvienne, il y a toujours eu, dans quelque temps que ce soit, dans quelque univers, un être qui souhaitait nous ressembler.

     

     

    Il y en eut toujours pour nous imiter.

     

     

    Certains préféraient s’imaginer qu’ils chantaient aussi bien que nous, que leur voix s’élevait aussi loin que nos ailes nous portent. D’autres aimaient à croire qu’ils étaient faits d’aussi beaux atours que les nôtres.

     

     

    Il y en eut toujours pour nous admirer. Nous craindre. Nous houspiller. Et parmi nous, il en fut toujours quelques-uns pour s’en enorgueillir…

     

     

    De ceux-là, je ne souhaite être la sœur. De ceux qui, aujourd’hui, déchirèrent les chairs de mon plus bel ami, je ne veux jamais plus entendre le chant.

    Qu’ils crèvent! Que ce festin de peaux, de sang et d’ossements leur pèse à jamais, qu’ils ne puissent plus connaître la caresse du vent, dans ces cieux irisés. Que leur orgueil dévore leur plus petit reste d’incarnation, comme ils s’en sont nourris ce jour, sombres ignorants!

     

     

    [...]

     

     

    Ainsi, il avait toujours cru, comme Sir James Matthew Barrie avant lui, dont il était fervent admirateur, qu’à la naissance, les enfants n’étaient tout d’abord rien de moins qu’oiseaux ou fées, dont les ailes disparaissaient en grandissant, quand leur âme n’était plus alors qu’un abîme où flotterait pour toujours le souvenir voltigeant de ces membranes à plumes qui ornaient autrefois leurs épaules, avant qu’ils ne doutent d’elles.

    Il soufflait ces quelques mots, au gré du vent qui nous les rapportait, tandis que dans un rire, il chuchotait encore qu’il était bien vain de désespérer, puisque la mort, cet être ailé parmi tous volatiles, viendrait bien nous emporter un jour hors du monde de la même façon qu’on y était entrés…

     

    Qu’en serait-il de nous, qui vivons à tire-d’aile chaque jour de notre existence?

     

    Je ne sais si c’est sa propre étonnante longévité qui influa sur la mienne, je n’ai guère de connaissances, autres que celles du bruissement de l’air au creux de mon plumage, de la caresse glacée d’un nuage en vol de nuit, d’un chant serein ou bien guerrier, ou encore du plaisir de voir quelques lueurs irisées s’accrocher pour quelques instants encore à mon sillage, mais j’ai conscience d’avoir vu tomber inertes, au sol, de biens plus jeunes frères et sœurs que je ne le suis aujourd’hui. Cependant, je n’ai aucune illusion quant à bientôt les rejoindre, maintenant que lui n’est plus, au cœur de cette nuit.

     

    J’aurai souhaité être la Mort, peut-être, une fois seulement, être celle qui nous emporterait tous deux, lors d’un dernier vol majestueux, au-dessus des mers et par-delà la voie lactée, sur mes ailes, pour le dernier voyage.

     

     

    [...]

     

     

    Lutine Aurel Bonnemaison -


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  • - Quelque part sur cette terre, peut-être une trace de moi subsistera, quoique soit ce moi, quelque forme qu'il prendra, poussière, charbon, corps ou âme, je serais disséquée, disséminée aux quatre vents, et j'aurai existé, une minute ou une heure, pour quelqu'un, pour ces autres, que je frôle encore parfois, du bout du doigt. Au moins, j'aurai été élément, dans ce monde que je foule, que j'écraserais bien quelquefois lorsqu'il blesse.

     

     

    Chaque chose à sa place, chacune son devenir.

    "Je suis élément de ce monde, ce monde est mon élément", ai-je dis, déjà, il y a longtemps.

     

     

    J'aurais été aussi insignifiante qu'un souffle quand les siècles auront passé, mais il aura peut-être porté en lui les germes d'un second, et l'existence suit son cours, d'un souffle à l'autre. -

     

     

     

    - Lutine Aurel Bonnemaison -


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