• Terre et Eau .

    Vous ne le saviez sans doute pas, mais je suis une animiste! J'aime à penser que la Nature est souveraine, qu'elle est maîtresse de nos vies, et qu'un jour où l'autre, nous humains, paieront le mal que nous lui aurons infligé! C'est donc à elle que j'offre ici ce texte, daté de 2004, tiré des profondeurs de mon esprit.


    Terre et Eau

     

    Je suis un lit. Un lit usé et seul. Un lit qui rien n'abrite. Desséché, tari, et vide. Je pense et j'attends, depuis l'aube des temps. Que l'Homme passe, il ne me verra pas, creux terreux sans intérêt que plus rien ne nourrit.

    Les feuilles d'automne chutent et virevoltent, atterrissent sur moi où elles s'en viennent pourrir, désagréger puis s'envoler, poussières. Je ne suis pas même une tombe.

    Les jours se ressemblent, les mois et les années passent, les siècles tremblent, mais jamais je ne trépasse...

     

    Les Hommes ne sont plus. Ils ont cédé la place à Dame Nature la conquérante. J'entends alentours la rumeur de ses rampantes compagnies qui établissent minutieusement, lentement, leurs positions.

    Un siècle passe encore.

    La rumeur s'est faite bruit.

    Née d'un ultime espoir, une larme vient brûler ma gorge plus que déshydratée.

    Une larme?!? Est-ce possible?!?

    ...

    Subitement, je te sens affluer vers moi.

    Tes écumes s’approchent, m'effleurent délicieusement, multitude d'aiguilles venant m'électriser.

    Tu ondules lascivement au dessus de mon être, venant lécher ma chair comme on lèche une plaie. Les vents qui t'accompagnent sont autant de caresses qui balayent mon armure, augmentant ma tourmente.

    Ta salive vient à bout des dernières rouillures et mon ventre palpite, réceptacle de vie.

    En vagues tu t'élances, Eau, et t'insinues en moi.

    Je te sens qui t'agites en multiples ondées, allant fouiller plus loin dans mon immensité.

    Ta voix s'élève, cristalline, abreuvant mes silences et brisant mon mutisme, et un murmure s'arrache à mon gosier aride pour te souffler les mots que me livre l'extase.

    Nos chants s'apaisent enfin. Ton flot se fait plus doux.

    Ta robe chatoyante scintille légèrement et la lune se mire en tes reflets d'argent.

    Tu stagnes, paisible, en moi, t'apprêtant au repos.

    Communiant extatique, je contemple tes courbes abandonnées au creux de mon existence, tandis que lascive et confiante tu t'offres au sommeil.

    ...

    Je suis un lit. Le lit d'une rivière qui m'a fait don de vie. Le lit d'une enchanteresse aux mille et uns visages. Aimant, riant, comblé. Je la veille et la berce, jusqu'à la nuit des temps.

    Quelqu'un approche...

    Chuuttt!!! Il ne faut réveiller l’Eau qui dort.  



     

    Lully. ©



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